Un instant hors du temps | Effy & Gallen

Ce soir je suis seule au manoir et… ce n’est pas juste ! Matthew a réclamé l’aide de Jake et des garçons pour une mission commando-je-ne-sais-pas-trop-quoi et même Chaton est de la partie ! Mais pas moi, visiblement ils me considèrent encore trop jeune dans le monde des strigoïs pour prendre de risques et je dois dire que je déteste ça. Alors quoi, on m’envoyait en mission lorsque j’étais moroï mais pas quand je suis strigoï ? C’est n’importe quoi ! Alors forcément que je ne reste pas au manoir quand on me le demande et s’ils rentrent avant et sont inquiets et bien tant pis pour eux, ça leur apprendra à me laisser sur la touche comme ça. Oui je peux être assez revancharde et ma transformation n’a pas tellement arrangé ce côté de ma personnalité, loin de là même.

Comment j’en viens à me retrouver sur ces montagnes ? Tout simplement parce que je voulais un terrain vaste et calme pour m’entraîner avec mes nouvelles capacités et vu que la forêt est un terrain assez dangereux de nos jours et que je ne tiens pas non plus à prendre de risques inutiles, et bien j’ai été raisonnable en optant pour la montagne. Comme quoi je fais des efforts, vous voyez ! Après ce n’est pas de ma faute si l’unité croit que la ville entière leur appartient, je ne vais pas non plus rester enfermée au manoir tous les soirs. Si je me suis assez facilement faite à ma nouvelle rapidité, il me faut encore m’entraîner avec ma force et l’hypnose. Pour une ex moroï de l’esprit, je me dis que l’hypnose doit être un jeu d’enfant pour moi, pourtant ce n’est pas vraiment la même façon de faire… Loin de là même.

« Tu m’as entendu ? Je t’ai dit de sauter de la falaise ! » Oui c’est sur un villageois du coin que je m’entraîne, il est un peu abîmé mais toujours vivant, il faut bien quelques cobayes pour commencer. Sauf que le type reste planté devant moi, tremblant, à me regarder avec des yeux de merlans frits. « S’il vous plaît, j’ai une femme et des enfants, ne me faites pas de mal. » A quel moment est-ce que je lui ai demandé de se plaindre au juste ? Aucun. Cette foutue hypnose ne fonctionne pas ! « Je ferais dévorer tes enfants à ta femme si tu ne fais pas ce que je te demande. » Il lâche une larme et se lève pour se diriger vers le bord de la montagne, sauf que c’est juste de la triche ce que je suis en train de faire, pas de l’hypnose et ça m’agace plus qu’autre chose. « Attends. » Le corps tremblant au bord du vide, l’homme se tourne vers moi et avant que je n’ai le temps de dire quoi que ce soit, ce sont des coups de feu plus loin à travers la montagne qui se font entendre et attire mon attention. « C’est ton jour de chance on dirait. » Et sur ces mots je disparais, laissant le type planté là pour aller voir ce qu’il se passe.

La curiosité est un vilain défaut à ce qu’il paraît, mais c’est plus fort que moi, surtout que ces derniers temps qui dit coup de feu dit généralement unité et je ne voudrais pas passer à côté de l’occasion d’en éliminer quelques-uns. Je me fiche bien que ce soit dangereux, j’avais dit que je ferais des efforts mais les garçons n’avaient qu’à pas aller s’amuser sans moi ! Je me sers tant bien que mal de mes sens pour retrouver la piste de ces hommes, les coups de feu aidant pas mal à m’orienter, du moins jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent. Je me concentre, cherche à trouver des traces autour de moi ou quoi que ce soit qui pourrait me donner une indication puis… C’est une respiration saccadée que j’entends et un moroï que je déniche de sa cachette en le soulevant aussi facilement qu’une plume par le col. Sourire aux lèvres, j’observe ma proie apeurée. « Pauvre petit moroï qui s’est fait abandonner par son dhampir. » Mordre à son cou semble très tentant… Du moins avant qu’il ne se décide à rétorquer. « Gallen ne m’a pas abandonné ! Il les a attirés loin de moi pour me sauver ! » Mes sourcils se froncent à ces mots. « Gallen ?... » Je doute qu’il y ait deux Gallen en ville, ou même sur la planète d’ailleurs. Est-ce que je dois laisser ce minable moroï survivre pour autant ? Peut-être qu’il compte pour Gallen… Raah ça fait décidément trop de personnes que j’épargne ce soir, ce qui doit être le comble pour une strigoï.

De nouveaux coups de feu se font entendre et je laisse le moroï s’écrouler lamentablement sur le sol, disparaissant d’ici pour me rapprocher des sons, inquiète de l’état dans lequel je retrouverais le dhampir. Les coups de feu ont cessé lorsque j’arrive, l’odeur du sang est plus que présente mais il ne semble n’y avoir plus personne, si ce n’est un cadavre humain. Où es-tu passé Gallen ? C’est sa voix que je finis par entendre et mon regard se fronce lorsqu’il se tourne vers le rebord de cette falaise où je m’approche. Bon sang Gallen, tu trouves toujours le moyen de te mettre dans des situations extrêmes ! « Tu as des envies de saut à l’élastique, Gallen ? Non parce que si c’est le cas tu as oublié l’accessoire principal : l’élastique. » Et après cette petite moquerie, je viens attraper la main de Gallen et plonge mon regard dans le sien. « Fais-moi confiance.» J’ai plus de forces que lorsque j’étais moroï donc je pourrais facilement te soulever toute seule, et je crois que mes yeux cerclés de rouge en sont la meilleure preuve. Alors j’agrippe le bras de Gallen et le soulève facilement pour le ramener au sommet de la falaise, mais je ne lui laisse pas le temps de poser des questions, c’est moi qui commence. « Tu m’expliques pourquoi l’unité te prend pour cible ? » Parce qu’il s’agit forcément de l’unité vu les fringues et les armes que j’ai vu sur le cadavre. Allez Gallen, explique, parle, détourne mon attention de cette odeur de sang qui commence dangereusement à éveiller mon appétit… Il ne faut pas oublier que je suis une jeune strigoï après tout, mais je ne tiens pas non plus à sauter sur la gorge du dhampir alors n’importe quoi serait le bienvenu pour attirer mon attention sur autre chose.